Après avoir invité Guillaume Desbieys qui nous présentait son plugin CommentLuv Cheater, voici un nouvel invité sur le blog pour un interview cette fois-ci, dans la série des SEO à découvrir.
Bien que je ne pensais jamais faire ce type de billets, j’ai du faire une exception quand j’ai rencontré Alexis lors d’un apéro SEO avec qui j’ai eu une discussion bien intéressante, il n’a pas tout à fait la même vision du SEO que nous: normal il travaille sur Yandex en plus de Google! Bref, ça ne fait pas de mal de savoir comment ça se passe ailleurs, en sortant des frontières de la communauté SEO Francophone.
Bonjour Alexis, pour ceux qui ne te connaissent pas, peux-tu présenter ton parcours, ton entreprise et ton blog ?
Salut, Aymeric et tous les lecteurs du blog Yapasdequoi.com. D’abord, je te remercie de m’avoir proposé cet interview. C’est le premier que je donne en français et franchement il y a un petit trac:)
Je m’appelle Alexis, j’ai 26 ans. Je vis à Minsk, Biélorussie, et je suis responsable de la qualité des prestations SEO dans une agence web biélorusse. Dans l’agence, on vise principalement les marchés de l’Europe de l’Est. D’un coté, je suis chargé de référencement de quelques grands comptes (immobilier, assurance, finances), de l’autre, je participe dans l’élaboration des stratégies de référencement et j’interviens dans les projets en difficulté.
Linguiste de formation, je suis passionné par la recherche d’information et l’implémentation de la linguistique dans les campagnes de référencement. Je rédige de temps en temps des billets sur mon blog Alekseo.com que j’ai lancé pour partager de petites belles choses de notre métier et parce que je trouve que la communauté SEO francophone est super sympa:)
Concernant la popularité des moteurs de recherche en Europe de l’Est, peux-tu nous faire un état des lieux brièvement?
La situation est différente en fonction d’un pays qu’on vise: Russie, Ukraine, Biélorussie ou Kazakhstan. Spécialement pour les lecteurs de ton blog, j’ai récupéré les stats récentes (mars 2013):
Bref, en Russie on met en priorité Yandex, en Ukraine et Kazakhstan – Google. Toutefois, il n’y a pas de suprématie indéniable d’un seul moteur de recherche et pour atteindre la meilleure visibilité on doit optimiser pour deux (au moins).
Je trouve que la possibilité de référencer sur quelques moteurs de recherche est notre grand privilège. D’abord, parce qu’on ne met pas tous les œufs dans le même panier et s’il y a Google qui déconne avec de nouveaux spécimen de son zoo, il y a toujours Yandex qui nous soutient. Et vice versa.
Ensuite, il y a des avantages dans l’analyse de notre travail: si tu as de bonnes positions sur Yandex, mais tu rankes mal sur Google, alors il suffit d’apporter de petits correctifs «Google-friendly». Pourtant si tu es invisible sur l’un comme sur l’autre, alors tu as l’air de négliger les «fondamentaux sacrés».
Mais il y a aussi des difficultés qui en découlent. On doit traiter considérablement plus de données (monitorer les deux algos et plus de crawlers) et chercher toujours du compromis dans l’optimisation pour satisfaire les deux moteurs (ce qui est bien à Google n’est pas forcément bien à Yandex).
Combien coûte le référencement en Europe de l’Est, quel type de prestations peut on trouver?
Ah, question coût des prestations, je crois que c’est un peu le même foutoir que chez vous:) Il y a quelques mois, il y a eu une étude du marché SEO en Russie. Pour le même site, l’écart entre le devis le moins cher et le plus coûteux était 40 fois!
Je n’aime pas parler des chiffres moyennes, mais pour que tu fasses un peu l’idée des prix, référencer un site dans une thématique genre «maisons en bois» avec une 20-30-aine de mots-clefs te reviendra: en Russie et Ukraine à €700-€1000/mois pendant 6-8 mois; au Kazakhstan à €300-€400 au cours de 5 mois, en Biélorussie à €250-350/mois au cours de 2-3 mois. Mais ça varie très fort en fonction de l’agence.
Quant aux schémas courantes de travail, les voici par ordre décroissant :
• vente des positions (en particulier, le paiement pour chaque jour que le site client se trouve dans le TOP);
• vente du traffic organic;
• vente des leads (commandes, coups de fils, inscriptions etc).
Pourtant, en comparant les marchés russe et français, il n’y a pas beaucoup de conseil: les clients préfèrent plutôt le référencement « clé en main ».
C’est comment, le travail avec Yandex ?
Bon, il est vrai, le dernier temps, Yandex est assez calme par rapport à Google:)
Les tendances qu’on voit aujourd’hui sur Google, on les a déjà vues en quelque sorte sur Yandex. Par exemple, les algos AGS-17 et AGS-30 qui luttent depuis 2009 contre les sites de mauvaise qualité, n’en leur laissant qu’une seule page dans l’index. L’algo «T’es spammy» en 2010 a très vite mis fin aux gros pavés de textes et ce qu’on appelle en anglais «keyword stuffing». Egalement en 2010, l’algorithme «Obninsk» a réduit l’influence de liens artificiels et a augmenté l’importance des textes de qualité…
C’est comment, le travail avec Yandex ? Avant tout, il faut avoir de la patience:) Les SERPs de Yandex ne se mettent pas à jour en temps réel, mais à peu près une fois par semaine (en été tous les 2 semaines). Donc, ce n’est pas toujours évident de marier les causes et les consequences de nos actions.
Le pivot du référencement sur Yandex est sans doute la géolocalisation: elle impacte le choix des mots-clés, l’architecture du site, l’éditorial et le netlinking. La recherche locale est l’arme principale de Yandex face à Google.
En travaillant avec Yandex, il faut soigner vraiment bien les textes. Le bourrinage de mots clés ne passera pas. La linguistique est ici notre meilleur ami: synonymes, champs sémantiques, thésaurus, associations, collocations, corpus de textes spam etc.
Yandex trie aussi de manière particulière les liens entrants. Tous ceux qui s’y intéressent j’invite à lire son fameux Rapport de Madrid (pdf en anglais).
Quelles sont les particularités du travail sur le netlinking en Europe de l’Est?
Dans 99% des cas, le netlinking est associé à l’achat de liens. Et c’est vrai. Le marché de liens en Russie est toute une industrie avec des millions d’euros de gains annuels. Par exemple, la plus grosse plate-forme de vente de liens Sape.ru contient aujourd’hui plus de 500 millions de pages web sur lequelles on peu acheter un backlink vers son site.
Il y a plusieurs types de ces plate-formes, appelées pour leur effet de masse «bourses de liens»:
• systèmes de location de liens (Sape.ru, Mainlink.ru, Trustlink.ru),
• systèmes d’articles sponsorisés (Miralinks.ru),
• systèmes de liens in-texte (Gogetlinks.net),
• systèmes d’achats de liens dans les blogs (Blogun.ru, Rotapost.ru)
• système de «liens rapides» (Kazapa.ru) etc.
Tu vois, il y a de quoi choisir!:)
Une conséquence inévitable: avec l’achat de liens on est devenu de gros fainéants:) La nouvelle génération des référenceurs ne sait plus chercher des backlinks gratuits, ils ne s’écrivent plus avec d’autres webmasters question échanges de liens et partenariats. Et effectivement, à quoi bon se bourrer la tête si on peut payer 3-4 euros et acheter un article sponso sur un site thématique?
Un autre groupe important constituent les systèmes automatiques de référencement. Il vous suffit d’entrer l’url de votre site et le système glanera toute la sémantique, répartira les mots-clefs sur les pages pertinentes, en un clin d’oeil fera l’audit technique, donnera les conseils sur le maillage interne et même le côté editorial.
A la fin, il sortira le pronostic du budget et du traffic pour chaque mot-clé, étudiera tous vos concurrents et proposera ainsi la meilleure strategie de l’achat de liens. Alors, il ne vous reste qu’ à charger des fonds et s’attendre à un miracle!:)
Par exemple, un jour, une mouche te pique de positionner ton blog sur la requête «продвижение сайтов» («referencement de sites») sur Yandex.Moscou:) Tu comprends bien qu’il te faudra acheter des backlinks, parce que apparemment tes concurrents le font. Pour avoir une estimation de budget à consacrer aux liens, tu inscris ton site dans un système automatique de référencement, par exemple, Seopult.ru. Voici ce qu’il affiche pour ton blog:
Ce ne sont pas des chiffres exactes, mais ils te permettent de faire l’idée de ce combien dépensent tes adversaires et de bien penser encore une fois s’il faut vraiment s’y plonger. D’après ce qu’on voit, la société qui est en première position sur cette requête paye 52 114 roubles (~1300 euros) par mois uniquement pour les liens. Et le TOP en France, combien coûte-t-il?:))
Exemples de ces systèmes:
• Seopult.ru (265 000 sites inscrits!),
• Rookee.ru,
• Webeffector.ru,
• Megaindex.ru.
(Petit inside: Le dernier va bientôt sortir sur le marché américain/européen).
Ah, j’ai oublié l’essentiel: tout le fonctionnel sauf l’achat de liens y est gratuit et accessible à tout le monde:)
Une question raisonnable que tu peux poser: «Allez, mais qu’en pensent Yandex et Google? Pourquoi les moteurs de recherche n’ont pas jusque-là mis fin à cette « industrie » ?».
Puisque ce n’est pas si évident qu’on ne le croit. La réalité est ainsi qu’ici tout le monde achète des backlinks: les mauvais comme les bons.
Il y a quelques années Yandex a déjà fait une tentative de désactiver tous les liens payants ce qui amené à une dégradation significative de ses SERPs. Ainsi l’antispam team a été obligée de reculer et prendre la position plutôt délicate en décidant de réduire peu à peu l’influence des liens artificiels.
En France, des secteurs comme le crédit ou le voyage sont ultra-concurrentiels. Quelles sont les thématiques les plus concurrentielles dans le SEO en Russie?
Ces thématiques sont également concurentielles en Russie. A côté de cela, on note aussi: immobilier, matériel informatique, téléphonie, logistique, portes appartement, climatiseurs.
Pourtant il y a une thématique à part. Pas même une thématique, mais un «mot-clé sacré». Un référenceur qui arrive à ranker son site sur la première page de Yandex (Moscou) sur « fenêtres pvc» a le plein droit de se nommer un {Expert|Gourou|Master|Messie|Dieu} du SEO:)
Merci d’avoir à mes questions Alexis!
N’hésitez pas à aller faire un tour sur son blog Alekseo.com. Pour le suivre sur Twitter, pour sa veille et ses bonnes idées de tests: @alekseo
Super intéressant ! Merci Aymeric et Alexis pour ce billet 🙂
Alex, tu reviens quand tu veux aux apéros SEO parisiens ;p
Salut, Diije! Merci pour ton commentaire et l’invitation! Bon, pour cet été je prévois plutôt le Sud (Nice & Lyon) début août. Paris, peut-être:)
C’est toujours intéressant d’avoir un retour d’expérience du SEO dans un autre pays, surtout quand ce n’est pas forcément Google qui domine.
Sinon, as tu réussi à placer une page web en 1ere page des SERP Yandex sur LA fameuse requête qui te donne le titre suprême xD ?
Je suppose qu’au niveau optimisation, c’est à peu près pareil ? Quand tu es top 3 sur Google, tu es généralement bien placé sur Yandex ?
Merci pour ton commentaire!
Euh, « fenêtres PVC » sur Yandex. Moscou pas encore, pourtant j’en ai deux sur Yandex.Minsk:)
D’habitude, c’est le contraire: si tu es bien placé sur Yandex, tu es le plus souvent bien positionné sur Google. Les fondamentaux des deux moteurs sont les mêmes: on doit travailler le côté technique, l’éditorial, le maillage interne, le netlinking. La différence est dans les détails (crawl, linguistique, balise , valeur des contenus internes etc.)
Et bah pour être pas banal, c’est pas banal !
J’ai pris beaucoup de plaisir à lire l’interview de Alex que je ne connais pas 🙂
Comme prévu c’est bien compliqué l’international mais qu’est-ce que ça doit être intéressant de voir autre chose de Google.
C’est pas étonnant mais c’est fou les ressources que vous avez en terme d’achat de liens en Russie, entre les bons liens achetés et Xrumer, vous avez de quoi faire du netlinking facilement 😀
Au plaisir de te suivre sur alekseo !
Evenstood, merci pour ton commentaire et je suis ravi que tu as trouvé des choses intéressantes!
Le netlinking facile à ses avantages et inconvénients. Oui, on économise beaucoup son temps, mais dans des thématiques concurrentielles le référencement devient souvent une course des budgets.
À part les outils de netlinking il y a aussi d’autres trucs curieux genre gestion des campagnes de liens sponsorisés, monitoring des campagnes SMM, achats de tweets, même d’actions des internautes.
Voilà une interview très enrichissante. Je suis surpris de voir que Bing est encore moins présent qu’en France sur ces marchés de l’est. Et puis je n’avais jamais entende parler de rambler et mail.ru.
Je serais aussi curieux de savoir comment un français peut se retrouver en Biélorussie, ce n’est pas très courant. Enfin, pourquoi « fenetre pvc » est une sainte requête dans ces pays ? Les gouvernements respectifs donnent des primes écologiques pour les travaux d’isolation ?
Puntocano, merci pour ton comm!
Bing est complètement nul en Russie:)
La « sainteté » de la requête vient directement de la demande extrêmement élevée. On a un client qui lui seul a 3 sociétés de vente de fenêtres. Et il pense en monter encore! Bon, apparemment ça rapporte bien:)
Quant à ta question pourquoi je vis en Biélorussie, je dois décevoir ta curiosité:) Tout simplement parce j’y suis né, j’y ai fait mes études et j’y travaille (au moins pour le moment).
Super cette interview.
Complètement d’accord par ailleurs sur la « simplicité » d’obtenir des liens.
C’est ça à mon sens qui va réellement faire la différence maintenant c’est la capacité d’acquérir du lien compliqué avec du contenu de qualité.
Salut, JB et merci pour ton comm!
En fait, les bons liens dans du contenu de qualité s’achètent aussi:)
Le référenceur chez nous doit savoir gérer scrupuleusement son graphe de liens. Parce qu’en achetant des backlinks en grosses quantités on risque fort de se laisser emporter et de tomber facilement sous un filtre genre pingouin.
Excellent cette interview !!
C’est assez hallucinant de voir la différence dans la méthodologie de travail d’un moteur à l’autre.
Yandex est encore loin de Google niveau complexité algorithmique pour classer les sites. Ca à le mérite de facilité un peu le travail mais du coup ça impact la créativité.
D’ailleurs, ça me donne même une certaine nostalgie du métier, quand on pouvait encore utiliser des techniques borderline pour faire grimper nos sites.
Mais la différence c’est qu’en Russie il y a beaucoup plus de site qui utilise les mêmes techniques seo depuis longtemps donc s’il y a une grosse maj sur une technique ultra utilisée c’est pratiquement les 3/4 des sites qui tombe 😀 comme tu l’as démontré dans ton article.
Grosso modo si t’a du fric tu monte sinon tu ramasse les miettes 😉
Salut, Michael! Je suis content que t’as trouvé des choses intéressantes dans l’interview!
D’ailleurs, quant aux futurs maj en terme de netlinking, Google semble être moins délicat que Yandex… Ouf, ça chauffe!:)
Hé ben, c’est rare d’en apprendre autant en une seule interview. Merci à Alexis pour le partage et à toi, Aymeric, d’avoir réalisé cette ITW !
Comme quoi chaque pays a sa propre culture du search et du SEO, c’est très intéressant de savoir comment travaillent « nos confrères » à l’étranger !
Merci pour cette interview qui montre comment se passe le SEO à l’est, là ou l’achat de lien est roi.
Ayant un site russe dans les cartons de 2013, je sais à quoi m’attendre maintenant.
Mais je ne devrais pas le placer sur « fenêtre pvc » donc ça devrait aller ^^
Merci Aymeric et Alexis de vous être prêtés à cet exercice.
Le référencement à l’étranger / pour un moteur de recherche différent de Google est toujours très intéressant. Google ne sera pas forcement éternel. Il suffit de se rappeler de Yahoo … 😉
Note a Aymeric « je commente si je veu d’abord! »
Sinon tres bien cette interview: ca fait bizarre de voir un marché ou l’achat de liens « domine » en quelque sorte – et ou pour une fois on est pas obligé de dealer uniquement avec GG. Ca me rapelle les belles années de mes débuts ou j’allais vaillament checker mes rankings dasn Voila, et autres Lycos tiens … C’est cool d’en savoir un peu plus sur « Alekseo » au passage puisque je commente sur son blog depuis peu et qu’il pond de bons articles – notamment le dernier sur la relation client
Of course! mais je suis tellement habitué à voir un commentaire de toi sur tous les articles traitant de SEO que je m’étonnais de ne pas t’avoir vu passer sur ce billet ;-))
Moi qui me demandait il y a peu « mais c’est comment Yandex? » je suis servie! Je ne savais pas que les SERPs de Yandex ne se mettaientt à jour qu’une à deux fois par semaine; cela force à réfléchir à deux fois avant de valider son action. Un grand merci pour cette interview très complète. De plus, je me retrouve dans la formation d’Alekseo: être linguiste sert indéniablement en SEO 😉
Super intéressant, j ai pris un grand plaisir et surtout une grande intention à lire cet article. Je suis fasciné par la méthodologie que tu prends pour ranker ton site sur yandex. Comme tu l as dit chaque moteur de recherche a ses propres critères de qualité, il faut à chaque fois apporter une touche corrective sur ses actions. C’est un travail long et minutieux à pérenniser son seo surtout sur différent moteur.
Concernant le netlinking, à l heure d’aujourd’hui c est que l achat de liens article sponsorisé facilite un peu ou beaucoup le travail. Enfin pour un referenceur selon son profil, pour ma part cela reste toujours un kiff de rechercher des backlinks gratuitement surtout de qualité en jouant a l agent secret en espionnant ces concurrents. 😉
Un interview vraiment édifiant sur ce qui se passe ailleurs dans le monde de la SEO. Une vrai marché de liens qui a le mérite d’être mis en lumière avec autant de détails! Merci pour ce partage qui surement feront réfléchir plus d’un.